« Nous allons renforcer la sincérité budgétaire et la transparence des opérations »

Thècle Wilfried Nzamba Mangala, directeur général du Budget, confirme l’effort de l’État pour réduire son train de vie en 2025. Malgré 7,3 milliards de FCFA de baisse des crédits destinés aux investissements, une part significative des finances est destinée aux infrastructures routières, énergétiques, sanitaires et scolaires. 

 

Après bientôt un an à votre poste stratégique de directeur général du Budget, pouvez-vous esquisser les contours de votre bilan ?

 

Thècle Wilfried Nzamba Mangala : Depuis le 27 juin 2024, date de ma prise de fonctions comme directeur général du Budget (DGB), je coordonne les activités de cette entité administrative en effet très stratégique dans le fonctionnement de l’administration gabonaise. Aussi voudrais-je, à travers les colonnes de votre magazine, non seulement vous remercier pour l’opportunité que vous me donnez de pouvoir mettre en lumière nos activités, mais également exprimer toute ma reconnaissance à Monsieur le président de la République, chef de l’État, chef du gouvernement, S.E. Brice Clotaire Oligui Nguema, pour la confiance qu’il a placée en ma modeste personne en me nommant à la tête de cette direction générale. La meilleure façon de continuer à lui exprimer cette gratitude est de bien faire le travail qu’il attend de nous. C’est à cela que nous nous attelons, avec mes collaborateurs, pour la réussite de cette délicate et exaltante mission. 

En tant que premier responsable de la DGB et pour ne parler que des actions qui intéressent toute l’administration, nous pouvons noter l’établissement d’un contrat d’accompagnement pour la mise en place d’un système de management de la qualité ainsi que l’affirmation de la déconcentration de la fonction d’ordonnateur du budget de l’État par une plus grande responsabilisation des gestionnaires mais aussi des directeurs centraux des affaires financières. Dans le même élan, on peut citer le lancement de certaines réflexions, notamment sur l’optimisation des dépenses des fédérations sportives, sur l’amélioration de la budgétisation des services publics personnalisés, sur le renforcement de l’efficacité du suivi des services en autonomie financière et sur la consolidation du calendrier budgétaire, ce qui a permis, en 2025, de mettre rapidement le budget en place dès le début du mois de janvier. Comme vous le rappeliez, cela fait déjà un an que nous sommes chargés de mettre en œuvre la politique du gouvernement en matière de préparation, d’exécution et du suivi du budget de l’État. Nos actions, comme celles des autres directions générales, s’inscrivent de façon cohérente dans la feuille de route que le chef de notre département ministériel, le ministre d’État Henri-Claude Oyima, nous a prescrite. Par conséquent, une partie de notre bilan ne se fera que d’ici quelques mois au regard de ladite feuille de route, qui intègre elle-même les orientations du chef de l’État. En tout état de cause, ce qui est attendu de nous, c’est d’apporter toute notre expertise et notre sérieux dans les actions d’amélioration de la gestion des finances publiques. Ainsi, la direction générale du Budget va œuvrer à rétablir l’orthodoxie budgétaire et à promouvoir la performance des processus budgétaires, notamment par l’optimisation de la dépense publique et la sincérité des documents budgétaires. Cette ambition sera soutenue par la modernisation des outils de gestion budgétaire, la mise en place d’un système d’information intégré pour plus de transparence, la finalisation du système de management de la qualité et la digitalisation de l’ensemble de nos procédures. 

 

« Il y a une baisse des dépenses de l’État, qui passent de 2 818,4 à 2 794,5 milliards de FCFA. »

 

La restauration de l'orthodoxie financière constitue l'une des principales réformes que doit mener votre département. Pouvez-vous nous décliner les principales orientations de la loi de finances 2025 ?

 

La loi des finances 2025 a été adoptée dans un contexte politique de transition institutionnelle et repose sur des objectifs clairs : renforcer la stabilité macroéconomique et promouvoir, ou du moins soutenir, le développement économique du pays. Le chef de l’exécutif a dressé une vision claire dans son Programme de société « Gabon 2025-2032 : Bâtissons L’Édifice Nouveau, pour notre essor vers la félicité. » Son élection étant intervenue en cours d’année 2025, la prise en compte de cette vision sera amorcée dans le prochain collectif budgétaire. Vous pouvez ainsi observer que par rapport à l’année 2024, la loi de finances de 2025 introduit une amélioration significative dans la mobilisation des recettes brutes, puisqu’en 2025, le niveau de recettes est évalué à 2 996,5 milliards de FCFA, contre 2 970,2 milliards en 2024, alors que dans le même temps, il y a une baisse globale des dépenses de l’État, qui passent de 2 818,4 à 2 794,5 milliards de FCFA. 

 

Le second point important à relever, c’est la part réservée à l’investissement dans ce budget de l’État : malgré la baisse globale des dépenses, les crédits d’investissement du budget général sont estimés à 592,6 milliards de FCFA, en baisse de 7,3 milliards de FCFA par rapport aux 599,95 milliards de FCFA arrêtés en 2024. Cette enveloppe est principalement destinée à des projets structurants, notamment les infrastructures routières, énergétiques, sanitaires et scolaires. Par ailleurs, l’instauration des journées comptables a permis une meilleure régulation de la dépense publique, favorisant un rythme soutenable des paiements, tout cela pour éviter une forte accumulation des instances au niveau du Trésor public. Dans cette perspective, le respect des journées comptables ne peut avoir qu’un impact positif direct sur la dette intérieure. En outre, les dépenses sociales ont également connu une augmentation significative afin de concrétiser la vision politique des plus hautes autorités. En un an, le budget affecté au secteur de la santé est passé de 131,4 milliards de FCFA en 2024 à 141,1 milliards en 2025, soit une hausse de plus de 9,6 milliards, et celui de l’éducation nationale de 234,3 à 255,6 milliards de FCFA, en augmentation nette de 21 milliards par rapport à 2024. Enfin, les conférences de répartition de crédits organisées au cours du second semestre 2024 ont permis d’ajuster les inscriptions et les affectations budgétaires au plus proche de la réalité des départements ministériels avec, en ligne de mire, le double impératif que doit remplir l’exécution de la loi de finances 2025 : servir de catalyseur pour le développement économique et contribuer au bon fonctionnement des institutions post-Transition avec l’entrée du Gabon dans la Ve République.

 

 « La politique sociale est l’un des axes forts du programme de société du président élu. »

 

Les députés et les sénateurs ont adopté le budget 2025 de la Ve République d'un montant de 4 204,9 milliards de FCFA. Au-delà des priorités du remboursement de la dette, quelle place est accordée à la politique sociale, aux recrutements et aux régularisations administratives ou aux rappels de retraite et au poste dévolu aux étudiants boursiers gabonais présents aux quatre coins du globe ?

 

La politique sociale est l’un des axes forts du programme de société du président élu Brice Clotaire Oligui Nguema. En effet, le Pilier 4 du Plan stratégique pour un Édifice Nouveau (PSEN) parle justement du capital humain et de justice sociale. En présentant sa politique sociale en quatre axes : « Santé et éducation », « Femmes, jeunes filles mères et handicap », « Prévoyance et protection sociale » et enfin « Culture, jeunesse et sport », le président de la République, qui est pleinement conscient des tensions sociales dues à des attentes élevées, développe longuement ses ambitions pour l’éradication de la précarité et des inégalités sociales. Pour faire une rétrospective, il faut rappeler que dès les premières heures de la libération en août 2023, le chef de l’État avait annoncé une batterie de mesures visant à améliorer le quotidien des Gabonais. Il est justement rappelé dans le PSEN que le président de la République « a posé les jalons d’un nouveau contrat social fondé sur la réconciliation, la justice sociale, la restauration de l’autorité de l’État et l’écoute active des citoyens. Ce contexte a ouvert une fenêtre historique d’opportunités pour repenser le modèle de développement. » Comme vous l’imaginez aisément, la direction générale du Budget est entièrement mobilisée pour matérialiser cette vision politique. Il ne peut en être autrement. 

 

Pour ce qui est de l’éducation nationale et de la santé, il faut souligner que ces secteurs ont été revalorisés dans le budget de l’année 2025. Il en est de même pour le traitement des pensions de retraite. En effet, en 2025, un budget de 106,4 milliards de FCFA a été consacré à cette dépense, qui représentait 99,04 milliards en 2024. Le gouvernement a par ailleurs débloqué un montant de 63,7 milliards de FCFA pour le paiement des rappels des pensions de retraite le 31 mars 2025 et de solde des fonctionnaires le 7 avril 2025. Ces exemples illustrent suffisamment la détermination du chef de l’État et la place centrale que le volet social occupe dans la politique budgétaire mise en œuvre par le gouvernement. Et nous ne pouvons qu’exprimer notre disponibilité et la reconnaissance d’avoir été choisi pour concrétiser cet engagement de l’exécutif qui ne vise qu’à donner de meilleures conditions de vie aux populations.

 

S’agissant de la dette, tout observateur avisé peut constater qu’il y a clairement, de la part du gouvernement, un respect des engagements. Á titre d’illustration, le gouvernement a réglé en mars 2025 l'intégralité de sa dette envers la Banque mondiale, soit un montant de 17,9 milliards de FCFA. Le pays a par ailleurs procédé à un échange de titres obligataires régionaux à hauteur de 592 milliards de FCFA, ce qui a permis de réduire ses obligations de remboursement de 1,4 % du PIB pour 2025 et de 0,8 % pour 2026. Quant à la stratégie d’endettement du pays, il faut dire qu’elle vise non seulement à stabiliser l’évolution du niveau de l’encours de la dette à échéance, mais également à reconstituer les marges d’endettement de l’État. Aujourd’hui, cette stratégie est beaucoup plus cohérente et en phase avec le potentiel économique du Gabon. C’est le pari que font nos autorités pour permettre à la dette d’être soutenable et au service du développement.

 

Enfin, il conviendrait de relever que depuis l’accession à la magistrature suprême de Son Excellence Brice Clotaire Oligui Nguema, président de la République, chef de l’État, chef du gouvernement, des actions à la fois diplomatiques et économiques sont menées pour restaurer la crédibilité de la signature du Gabon. Cette démarche est soutenue par une volonté politique inébranlable, ainsi que par le pragmatisme qui guide les choix économiques du président de la République depuis le début de la Transition. Des choix qui ont abouti au retour du Gabon sur la scène internationale ainsi qu’au lancement de plusieurs chantiers qui vont, à terme, diversifier l’économie et porter les germes d’une croissance robuste. 

 

Vous avez présidé le vendredi 26 juillet 2024 une rencontre de travail avec des représentants du syndicat des fonctionnaires de la DGBFIP et des responsables de la direction des ressources humaines pour jeter les bases d'un partenariat entre votre direction générale et eux. Quels ont été les suites de ce dialogue interne ? 

 

Le dialogue social est une constante de notre management à la tête de la direction générale du Budget. Vous avez évoqué ma nomination il y a un an, pourtant j’ai intégré ladite direction générale en 2005. C’est dire que depuis 20 ans, j’ai une bonne connaissance de cette administration et des conditions de travail des agents. Mes prédécesseurs ont toujours privilégié le dialogue social et l’amélioration des conditions de travail des agents, il est donc normal, de mon point de vue, de poursuivre ce qui a marché.

 

« Plusieurs chantiers lancés vont permettre de diversifier l’économie et porter les germes d’une croissance robuste. »

 

Quel est le contenu de ce partenariat, et quelle vision prônez-vous en termes de gouvernance ? 

 

En prenant nos fonctions, nous avons mis un point d’honneur à toucher du doigt les réalités que vivent nos collaborateurs et à contribuer de façon efficace à l’amélioration des conditions de travail de l’ensemble des agents de la DGB. Le 1er mai 2025 a donc été l’occasion de revisiter avec les représentants du syndicat et l’ensemble du personnel les grandes actions pour améliorer notre cadre de travail et notre rendement collectif. Pour illustrer quelques actions déjà mises en œuvre, nous avons procédé à l’élaboration des manuels de procédures et du manuel d’organisation des services, et nous avons garanti l’effectivité de l’assurance maladie complémentaire au profit des agents et de leurs ayants droit. Á cela s’ajoutent la régularisation et le suivi des situations administratives des agents ainsi que la mise en place d’un système de management de la qualité qui va nous conduire vers la certification de nos processus et de nos chaînes de valeurs. Nous avons également lancé un programme de renforcement des capacités des agents par des formations ciblées et pertinentes. En un mot, nous travaillons à moderniser notre direction générale afin qu’elle s’adapte au contexte de la Ve République et qu’elle joue pleinement son rôle dans un environnement de plus en plus exigeant. En conséquence, nous ne ménagerons aucun effort pour garantir un climat social sain, qui permette à chaque agent de s’épanouir et de travailler dans les meilleures conditions possibles.

 

Si nous tenons compte des besoins actuels en matière de finances publiques et d'investissements, peut-on savoir pourquoi le Gabon évalue ses options de financement à l'international, y compris pour des transactions privées sur les marchés des capitaux en dollars américains ?

 

Par définition, évaluer les besoins de financement, c'est prendre en compte plusieurs facteurs pour choisir le financement le plus adapté à un projet ou à une entreprise. C’est une démarche universelle et le Gabon, à l’instar des autres pays de la sous-région, a souvent émis des titres ou des bons du Trésor sur les marchés, qu’ils soient régionaux ou internationaux, en gardant à l’esprit cette exigence d’optimisation des financements.

 

« Nous avons mis en place un système de management de la qualité »  

 

Comment la DGB que vous dirigez compte-t-elle participer au projet de société du président « Bâtissons l'Édifice Nouveau » de cette Ve République ?

 

Permettez-moi, avant de répondre à votre question, de réitérer mes vives et chaleureuses félicitations au président de la République, chef de l’État, chef du gouvernement, Son Excellence Brice Clotaire Oligui Nguema, pour sa brillante élection au soir le 12 avril 2025. Élu à une majorité écrasante, il a lui-même rappelé que ce plébiscite des Gabonais était proportionnel à leurs attentes économiques et sociales. C’est fort de ces propos du chef de l’État que la direction générale du Budget, en tant qu’administration républicaine chargée de la formulation des politiques budgétaires et de la gestion de la dépense publique, poursuivra les réformes nécessaires pour restaurer l’orthodoxie financière, pour renforcer la mise en œuvre des bonnes pratiques et pour que la sincérité budgétaire et la transparence des opérations soient effectives. Vous comprenez bien que le succès de ce mandat présidentiel de la Ve République passe en grande partie par une gestion irréprochable des finances publiques afin de redonner à l’État sa crédibilité.

 

Propos recueillis par Serge-Henri Malet